Fiche 96 Description et efficacité des prédateurs d’acariens

Dernière mise à jour le 20 mars 2024
 

Fiche 96

Yvon Morin, Gérald Chouinard, Daniel Cormier et Robert Maheux

 

Note : consultez le guide chronologique du dépistage (fiche 65) pour visualiser les périodes d’activité des principaux organismes décrits dans cette fiche.

 

Phytoséiides
Description et comportement

Les phytoséiides (Amblyseius sp., Neoseiulus sp.,Typhlodromus sp.) sont les plus voraces des acariens prédateurs. Ils complètent plusieurs générations par année sous les conditions climatiques du Québec. Neoseilus (=Amblyseius) fallacis et Typhlodromus caudiglans (le typhlodrome) sont les deux espèces les plus souvent rencontrées en vergers.

phytoséiide

Leur corps transparent en forme de poire laisse souvent apercevoir un « H » coloré, de couleur rouge ou jaune, selon qu’ils se nourrissent de tétranyques rouges ou de tétranyques à deux points.

Les différentes espèces de phytoséiides sont impossibles à distinguer l’une de l’autre sans équipement spécialisé. De taille voisine à celle des tétranyques, ces prédateurs sont visibles à l’aide d’une loupe (10X ou plus). Ils se déplacent rapidement, contrairement aux acariens ravageurs.

De plus amples informations sur ces prédateurs se retrouvent dans le Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels ou sa version en ligne.

Alimentation

La proie favorite de ces prédateurs est le tétranyque à deux points. Le typhlodrome peut aussi se nourrir de tétranyques rouges et d’ériophyides. Cette espèce, contrairement à Neoseiulus fallacis, se nourrit de tous les stades de développement.

Il arrive que leurs populations soient très élevées dans des vergers où la population de tétranyques à deux points est élevée.

Il est alors possible de constater que, lorsqu’une source de nourriture est présente, ces prédateurs colonisent le pommier.

Activité

En début de saison, ces deux prédateurs sont présents surtout au sol. Ils se nourrissent de tétranyques à deux points sur les mauvaises herbes à feuilles larges. En fin de saison, à partir du mois d’août, ils se trouvent plus souvent sur les pommiers.

Efficacité

Souvent, le seuil d’intervention pour le tétranyque à deux points est atteint avant que les phytoséiides montent dans les arbres. Ainsi, s’il est possible de retarder le traitement, il peut y avoir augmentation des populations de phytoséiides. Si celles-ci sont assez abondantes, elles peuvent faire chuter rapidement les populations de tétranyque à deux points.

Sensibilité aux pesticides

Ces prédateurs sont très sensibles aux pyréthrinoïdes (UPCYDE, POUNCE, DECIS, RIPCORD et MATADOR) et au carbaryl (SEVIN). Le RIMON serait également toxique. Les fongicides contenants du mancozèbe (DITHANE, MANZATE, PENCOZEB) leur seraient aussi toxiques.

 

Stigmaéides
Description et comportement

Ces acariens prédateurs (Agistemus sp., Zetzelia sp.) ressemblent aux acariens ravageurs, mais leur couleur, comme celle de leurs œufs, est jaune citron (d’où leur nom anglais de « yellow mites »). Les adultes prennent parfois une teinte orangée (comme lorsqu’ils se nourrissent d’oeufs de tétranyques rouges). Ils se déplacent beaucoup moins vite que les phytoséiides.

Pour de plus amples informations sur ce prédateur, veuillez consulter le Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels (cliquer ici pour la version en ligne).

Alimentation

Le plus répandu des acariens prédateurs, l’agistème se nourrit surtout d’ériophyides et d’oeufs de tétranyques mais peut s’accommoder de pollen au besoin pour survivre à une pénurie de proies.

Activité

L’agistème est actif tôt au printemps et peut assez efficacement maintenir les populations de tétranyque rouge sous les seuils d’intervention. Cependant, c’est à partir de juillet et août qu’il se trouve en plus grand nombre, surtout lorsque les ériophyides ont été abondants l’année précédente.

Les stigmaéides peuvent aussi cohabiter avec d’autres acariens prédateurs, comme les phytoséiides.

Efficacité

L’agistème est le principal allié des pomiculteurs québécois contre l’ériophyide et les tétranyques. Il est cependant vulnérable, car sous certaines régies, il peut être décimé par la punaise de la molène (principalement dans des blocs trop vigoureux et peu taillés, ce qui est un environnement très favorable aux punaises) ou par l’utilisation de certains pesticides qui lui sont toxiques.

Si l’agistème est présent, il n’est pas recommandé d’intervenir contre l’ériophyide. Sa présence justifie aussi un dépistage « serré » du tétranyque rouge et du tétranyque à deux points avant d’intervenir.

 

Autres acariens prédateurs

Des photos de ces prédateurs se retrouvent dans le Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels ou sa version en ligne.

Balaustium

Cet acarien rouge vif est présent en début et en fin de saison sur le pommier. Il est deux ou trois fois plus gros qu’un tétranyque et se déplace rapidement à la recherche de nourriture. En fin de saison, il est très commun dans les vergers.

Balaustium

Allothrombium

Fréquent principalement en fin de saison, cet autre acarien prédateur se nourrit d’œufs de plusieurs insectes et acariens de même que d’adultes et larves de tétranyques. Il est plus gros que le tétranyque rouge et sa couleur est rouge orangée. Il se nourrit aussi de pucerons verts et peut être assez commun dans les vergers.

Allothrombium

Punaise de la molène

La punaise de la molène (Campylomma verbasci) se retrouve dans la majorité des vergers du Québec. En début de saison, elle y réduit efficacement les populations de tétranyques rouges. Malheureusement, elle a aussi tendance à se nourrir de jeunes fruits, et son comportement est difficile à prévoir.

punaise de la molène (adulte)

Pour de plus amples informations sur ce prédateur, se référer au Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels ou sa version en ligne.

Description et comportement

L’adulte est vert grisâtre et deux fois plus petit que la punaise terne. Il est possible de l’observer sur les jeunes pousses, où il se nourrit de pucerons et de sève.

À la fin de l’été, les œufs sont pondus sur des arbres où il y a des tétranyques rouges. Ils éclosent la saison suivante pendant la floraison du pommier. Les larves ressemblent au puceron vert, mais se déplacent davantage. Elles se nourrissent de larves de tétranyques.

Tel que mentionné, ce prédateur peut s’attaquer au fruit. Ce comportement dépend, entre autres, de l’abondance de proies, du cultivar et des conditions climatiques.

Il survient habituellement, lorsque la population de punaises de la molène est abondante et qu’il y a peu de tétranyques. La présence d’un cultivar attrayant, comme la Délicieuse rouge et la Spartan, favorise ce comportement. Dans les cas extrêmes, les autres cultivars peuvent aussi être attaqués.

Un temps chaud et sec après la floraison favorise aussi l’attaque des fruits.

Les dommages les plus importants sont faits entre le stade calice et le stade nouaison (10 mm). Après ce stade, il est préférable de ne pas appliquer de pesticides qui sont toxiques pour cet insecte afin de le maintenir dans le verger pour qu’il exerce son action prédatrice.

Sensibilité aux pesticides

La punaise de la molène est peu sensible aux insecticides de la famille des organophosphorés mais est très sensible aux néonicotinoïdes.

 

Punaise translucide
Description

La punaise translucide (Hyaliodes vitripennis) est une punaise d’apparence délicate, de dimension semblable à la punaise terne (4-5 mm). Elle est distinguable grâce à ses ailes transparentes barrées de deux lignes noires et à ses antennes rayées.

punaise translucide

Les stades immatures sont verts et le bout de leur corps, effilé et retroussé, prend une couleur rouge lorsqu’elle se nourrit de tétranyques rouges. La punaise translucide se retrouve presque toujours sur le dessous des feuilles du pommier. Dans nos conditions climatiques, il n’y a qu’une génération par année.

Pour de plus amples informations, se référer au Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels ou sa version en ligne.

Activité

Cette punaise était probablement le prédateur du tétranyque rouge le plus efficace et le plus courant dans les vergers du sud-ouest du Québec. Cependant, avec l’utilisation plus fréquente d’insecticides durant l’été contre le carpocapse, la population de ce prédateur a fortement diminué. Il se retrouve surtout dans les pommiers standards, mais aussi dans les pommiers nains et semi-nains.

Les premières larves arrivent seulement à la fin juin et les premiers adultes vers la mi-juillet. La ponte commence vers le début d’août.

Alimentation

En plus du tétranyque rouge, cette punaise se nourrit de cicadelles, de pucerons, de larves de lépidoptères et même de mineuses dans leur mine!

Pour favoriser sa présence

Il est possible de favoriser sa présence en tolérant les tétranyques dans un bloc. Les punaises translucides déposeront leurs œufs dans ce bloc au mois d’août. Il est important que les tétranyques soient encore présents au mois d’août, sinon, la punaise ira pondre ailleurs. Donc, un « grand nettoyage » des acariens ravageurs est à éviter.

Sensibilité aux pesticides

Il y a peu d’information disponible pour les nouveaux insecticides. Il est cependant connu que les néonicotinoïdes lui sont toxiques.

 

Autres punaises prédatrices

D’autres punaises prédatrices (réduvides, nabides, pentatomides, anthocorides et mirides) peuvent se nourrir quasiment de tout ce qui bouge et qui n’est pas trop gros. Elles sont souvent observées dans les vergers qui reçoivent un minimum d’insecticides pendant l’été. Certaines sont très voraces, comme la punaise soldat Podisus maculiventris.

Des photos de ces punaises se retrouvent dans le Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels ou sa version en ligne.

 

Introduction de prédateurs d’acariens en vergers

Il arrive malheureusement que les populations de prédateurs d’acariens disparaissent soudainement de certains blocs de vergers, soit en raison de l’application d’un pesticide qui leur est toxique, soit en raison de l’absence des acariens phytophages et des autres petites bêtes qui leur servent de nourriture. De nombreuses études ont démontré que la réintroduction de prédateurs dans ces zones est possible, en transférant du bois de taille d’été, ou simplement des feuilles de pommiers, à partir de vergers-source (spécialement dans le cas des phytoséiides et de la punaise translucide). Pour plus d’informations sur la méthode de transfert d’acariens par le bois de taille d’été, consultez le Guide des méthodes alternatives de protection des pommiers.

Les acariens prédateurs sont même disponibles commercialement au Québec pour lutter contre les tétranyques (FALLACIS-IMPACT d’Anatis Bioprotection). La grande sensibilité des prédateurs d’élevage aux pesticides et leur coût d’achat limitent actuellement leur utilisation, mais la protection des populations de prédateurs indigènes est fortement recommandée et profitable, comme présenté ci-après.

 

Abondance et efficacité des prédateurs d’acariens au Québec

Pour les tétranyques, il est estimé que les populations peuvent être maintenues naturellement en dessous des seuils de nuisibilité lorsqu’il y a au moins un prédateur de type phytoséiide pour 10 à 15 tétranyques. La présence d’ériophyides sur le feuillage tôt en saison augmente cette probabilité, car les acariens prédateurs les utilisent comme source de nourriture « en attendant » l’arrivée des tétranyques.

Nom Abondance Proie préférée Efficacité Intérêt en PFI
Stigmaéides +++ Tétranyque rouge +++ ++++
Ériophyide ++++ ++++
Phytoséiides ++ Tétranyque à deux points ++++ +++
Punaise translucide1 + Tétranyque rouge +++ ++
Punaise de la molène ++++ Tétranyque rouge ++ ++
Puceron vert ++ ++
Allothrombium ++ Non spécifié + ++
Prédateurs de pucerons2 Variable Puceron vert Variable ++
Balaustium + Variable + +

+ : faible; ++++ : élevé.

  1. Très affectée par certains traitements estivaux contre le carpocapse.
  2. Larves de cécidomyies, de syrphides, de chrysopes et de coccinelles.

 

Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.

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