Fontelis, Luna Tranquility, Aprovia, Sercadis: les “FLAS” sans le “flafla” des vendeurs…
Depuis 2012, des produits fongicides de la familles des SDHI1 ont été homologués au Canada pour réprimer la tavelure du pommier. Le Fontelis (Dupont), Luna Tranquility (Bayer), Aprovia (Syngenta) et Sercadis (BASF) (FLAS) sont apparus successivement dans le marché. Ces produits sont des “descendants” du boscalide contenu dans Pristine (BASF). Les FLAS sont efficaces contre le blanc et la tavelure alors que le boscalide n’a pas d’efficacité contre la tavelure.
Les FLAS partagent plusieurs caractéristiques. Comme ils sont tous issus du même groupe (FRAC 7), ils sont tous sujets à une résistance croisée. La résistance à une molécule du groupe entrainera les autres dans son sillage. Déjà, des souches résistantes sont rapportées2. Dans ce contexte, il est important d’alterner entre les familles et choisir les molécules les plus efficaces de chaque groupe pour ralentir la progression des souches résistantes à cette famille. C’est pour cette raison que le Pristine n’est pas recommandé en PFI (voir fiche 52) et que seuls les trois meilleurs SDHI (Fontelis, Aprovia, Sercadis) sont privilégiés.
Pour ralentir la résistance, les manufacturiers proposent des mélanges avec des produits de contact ou en imposent en vendant un produit pré-mélangé (ex: Luna Tranquility). Cette approche n’est pas sans faille (Voir la fiche 52 du guide PFI). En plus de limiter vos options de rotation, la seule garantie des mélanges est que le cout de vos traitements sera augmenté.
Outre l’alternance entre les familles, la meilleure stratégie pour contrer la résistance consiste à utiliser les produits de façon optimale: à la dose recommandée, au meilleur moment et surtout: ne pas miser seulement sur des produits à risque de résistance.
Utilité des SDHI dans un programme PFI3
Une lutte à la fois efficace contre la tavelure et optimale du point de vue des couts, passe par une stratégie adaptative. Les traitements avant les pluies (protection) ou pendant la pluie (germination) doivent inhiber la germination des spores, alors que les traitements après les pluies (post-infection) doivent pouvoir arrêter le champignon en croissance. Plusieurs produits sont efficaces en protection et en germination alors que très peu sont fiables en post-infection.
Les SDHI ne sont pas les meilleurs anti-germinatifs et sont efficaces en post infection. Comme les produits sujets à la résistance devraient toujours être utilisés modérément et de façon optimale, les SDHI sont donc précieux dans les cas où la protection ne suffit pas et qu’un traitement en post infection est jugé nécessaire pour combattre une infection en cours. Même si le temps d’intervention en post infection des SDHI est limité, leur utilité dans cette stratégie est indéniable. Sur la base des résultats obtenus à l’IRDA en 20144 avec le Fontelis (Dupont) et Aprovia (Syngenta) nous proposons de limiter le moment d’application des traitements à environ 560 degrés-heures (DH) après le début de l’infection (ex: 40h à 14°C), soit environ 700DH après le début de la pluie (ex: 50h à 14°C).
Malgré ce fait, les manufacturiers privilégient l’utilisation des SDHI en protection. Or dans la plupart des cas, utiliser les SDHI en protection n’apporte pas d’avantage stratégique et s’avère plus cher que les produits usuels. Les tests réalisés à l’IRDA de 2011 à 2014 avec le Fontelis témoignent de ce fait. Notons néanmoins que le produit Aprovia (Syngenta) en protection s’est avéré en 2014 meilleur que le Captan alors que la molécule utilisée dans le Sercadis (BASF) était moins efficace dans les mêmes conditions. Ces données concordent avec l’expérience acquise avec tous les produits pénétrants: même si en principe les SDHI résistent mieux au lessivage, en pratique les spores déposées sur la croissance foliaire apparue après le traitement ont bien plus d’impact que celles déposées sur les feuilles déjà traitées et partiellement lessivées.
Comme les SDHI n’offrent qu’une protection marginale des feuilles non présentes au moment du traitement, la fréquence de vos traitements ne sera pas diminuée par le recours à ces produits en protection.
En conclusion: Un traitement en protection avec un produit “classique”, suivi d’un traitement en post infection avec un SDHI (appliqué seul), sera toujours plus efficace qu’un seul traitement en protection d’un mélange de SDHI et d’un produit classique. Une stratégie “à deux traitements” n’est nécessaire que pour les cas de risque élevé (RIM >300).
1SDHI: succinate dehydrogenase inhibitor.
2Production fruitière intégrée.
3Ishii, H., et D. W. Hollomon. 2015. Fungicide Resistance in Plant Pathogens: Principles and a Guide to Practical Management. Springer.
4Philion, V., et V. Joubert. 2015. Evaluation of SDHI fungicides for protection and post-infection strategies to control apple scab, 2014. Plant Disease Management Reports 9: PF006.
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