Les traitements d’été quand les maladies ne prennent pas de vacances

Dernière mise à jour le 28 juin 2023
 

Pendant des décennies il était possible de prévoir un dernier traitement fongicide avant la Saint-Jean-Baptiste, avec le seul souci d’avoir laissé passer quelques taches de tavelure. Les traitements contre la tavelure en été étaient un peu comme les cours de rattrapage au lieu de passer du temps sur la plage: Une leçon dont il fallait se rappeler pour mieux traiter au lieu de sécher. Malheureusement, une gestion serrée de la tavelure primaire n’est plus une garantie de vacances dans les vergers où les maladies d’été causent des ennuis.

Qui sont les trouble-fêtes?

L’essor des maladies secondaires comme la suie-moucheture, la pourriture amère et Diplocarpon (Marssonina) forcent pour plusieurs un changement des habitudes de traitement. Différents cas de figure sont possibles. Dans les vergers où la tavelure primaire a été bien réprimée et où on a jamais observé de maladies secondaires,  les traitements fongicides en été demeurent inutiles. Ces vergers existent! Les vergers isolés qui ne jouxtent pas les forêts ou des cultures qui peuvent abriter les maladies d’été peuvent se passer entièrement de traitements fongicides. Pour tous les autres, c’est du cas par cas.

La suie-moucheture est une maladie assez fréquente, surtout problématique dans les cultivars tardifs qui donnent du temps aux champignons pour s’installer à la surface des fruits. Diplocarpon (Marssonina) est encore rare, mais cette maladie peut rapidement défolier les vergers atteints. Les cas spectaculaires sont limités aux vergers en production biologique, mais la maladie est occasionnellement présente dans les vergers où les stratégies fongicides sont allégées. Finalement, la pourriture amère est encore rare au Québec, mais peut exploser subitement lors des canicules, notamment dans les vergers où le feu bactérien est historiquement présent.

La modération a bien meilleur coût

Pour éviter de multiplier les traitements, différentes stratégies sont possibles. Pour la tavelure d’été, la pression de la maladie ne justifie pas toujours de traiter à chaque nouvelle infection. Selon l’intensité des traitements requis pour la tavelure, les autres maladies seront réprimées en même temps. En absence de tavelure, les traitements spécifiques contre les maladies secondaires ne sont justifiés que dans les vergers avec un historique. Pour la suie-moucheture et Diplocarpon, des modèles RIMpro peuvent vous aider à déterminer les périodes critiques d’intervention et de viser seulement les infections les plus graves. Il n’existe pas de modèle spécifique pour la pourriture amère, mais des stratégies de prévention incluant des traitements fongicides sont décrites dans la fiche.

Quel cocktail servir?

À une époque pas si lointaine, différentes options abordables étaient disponibles pendant la saison estivale pour protéger les fruits. La disparition du metiram (Polyram), les restrictions du délai avant récolte pour les traitements de mancozèbe (ex: Dithane) et pour le nombre d’applications permises de captan (ex: Maestro) et de soufre (ex: Kumulus) ont sérieusement compliqué la gestion des traitements d’été. En parallèle aux contraintes règlementaires, la résistance généralisée de la tavelure face au groupe 1 (ex: Senator) et les nombreux cas de résistance à la dodine (Syllit) qui étaient liés dans ce cas aux applications sur taches en été nous rappellent que le choix des produits peut avoir des conséquences à long terme sur la gestion des maladies. Dans un billet précédant les fongicides les plus utiles (coûts/bénéfices) et homologués après la floraison ont été présentés. En été, on peut ajouter à cette liste le cuivre. Comme le cuivre est phytotoxique sur fruits, ce fongicide est difficilement recommandable pendant la période de floraison et de la multiplication cellulaire des fruits. La période critique varie beaucoup, mais elle se termine entre 4 et 7 semaines après la pleine floraison. Par la suite, le cuivre redevient un outil à considérer en été. Les modifications récentes à l’étiquette de l’oxychlorure de cuivre permettent en été une alternative au Cueva. À la dose équivalente sous forme de cuivre métallique, les deux produits ont une efficacité égale et un risque de phytotoxicité similaire, mais l’oxychlorure est moins cher. L’effet du cuivre sur le ‘fini’ sur fruits rend cette option plus risquée, mais néanmoins acceptable pour plusieurs cultivars et quand les volumes de bouillie sont faible (ex: 250 L/ha). Les traitements de cuivre demeurent controversés puisqu’ils s’accumulent dans l’environnement et qu’ils sont nocifs aux vers de terre.

Fongicides en été: Si vous avez épuisé votre quota admissible de Captan et de soufre, les options intéressantes en été pour maintenir les 4 maladies sous contrôle (tavelure, suie-moucheture, Diplocarpon et pourriture amère) sont rares.

Le cuivre (oxychlorure, 500 g/ha, <10$/ha) appliqué en protection peut ralentir les maladies d’été, mais ne sera pas aussi efficace que le Captan (24$/ha) ou le Folpan (84$/ha) aux doses proposées sur la fiche 48.  Avec 8 applications admissibles, l’accumulation de cuivre dans l’environnement reste assez limité (4 kg/ha).

Allegro (0,73 L/ha, 89$/ha) est à la fois systémique (donc mieux réparti lors des traitements), efficace avant et après les pluies et peut aussi contribuer à la gestion des acariens. Ce produit est cependant critiqué pour deux aspects: Le fluazinam est dangereux pour la santé humaine (IRS = 1480) et sujet à la résistance (FRAC 29). Les risques de résistance sont cependant faibles par rapport aux autres groupes. Le délai admissible avant récolte est de 28 jours.

Le bicarbonate de potassium appliqué après les pluies (4 kg/ha, 15$/ha) demeure une option à privilégier, même sans soufre ajouté. Dans la mesure où les traitements sont réalisés rapidement après les pluies, soit 16 h après le début d’une pluie à 22 °C, cette approche est imbattable: abordable, sécuritaire, efficace.

Plusieurs fongicides homologués usuels (Cevya, Aprovia/Sercadis,Flint) ne sont pas proposés en été puisque les traitements sur des taches apparentes de tavelure accélère fortement la progression de la résistance. Il est préférable de garder les groupes 3, 7, 11 pour les traitements contre les infections primaires. Le phosphonate (phostrol) est efficace contre la tavelure et la suie, mais pas contre la pourriture amère. De plus, les résidus de phosphonate s’accumulent dans les arbres pendant des années.

 

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