Fiche 97 Description et efficacité des prédateurs de pucerons
Dernière mise à jour le 1 mars 2024
Fiche 97
Gérald Chouinard, Yvon Morin, Daniel Cormier et Robert Maheux
Les prédateurs de pucerons sont très communs dans les vergers et ils peuvent maintenir efficacement les populations de puceron présentes en dessous des seuils de nuisibilité. L’utilisation de pesticides à faible risque pour ces espèces utiles favorise leur présence dans le verger. Plusieurs de ces espèces se nourrissent aussi d’acariens, ce qui n’est pas sans intérêt (voir la fiche 96).
Consultez le Guide chronologique du dépistage (fiche 65) pour visualiser les périodes d’activité des différents organismes décrits dans cette fiche.
Cécidomyies prédatrices
Les cécidomyies prédatrices (Aphidoletes aphidimyza), à ne pas confondre avec la cécidomyie du pommier, constituent le plus important prédateur de pucerons verts sous les conditions prévalant au Québec. Elles se nourrissent également de pucerons lanigères, de pucerons roses et d’acariens. Les cécidomyies passent l’hiver dans un cocon enfoui à environ 1 cm sous le couvre-sol du verger. L’adulte est un petit moustique (3 mm) d’apparence banale et difficile à observer, apparaissant en juin. Chaque femelle pond jusqu’à 600 œufs, dont plusieurs sur les feuilles de pommiers, près des colonies de pucerons. Les larves (asticots) sont orange vif et ont l’apparence de petits vers (2 mm) sans tête ni pattes. Les premières larves sont présentes au début de juin et il y a, en général, deux générations par année. Seules les larves sont prédatrices. Celles-ci paralysent leur proie par une piqûre et les ponctionnent ensuite pour se nourrir de leur contenu. Une larve de cécidomyie peut consommer jusqu’à 60 pucerons durant sa vie.
En utilisant des pesticides qui vont favoriser leur présence (se référer au tableau de la fiche 95 sur la toxicité), les larves de cette espèce sont généralement suffisamment abondantes pour réprimer efficacement les pucerons verts sans besoin d’intervention. Il est estimé que les populations de pucerons verts peuvent être maintenues naturellement en dessous des seuils de nuisibilité lorsque 25 % des pousses affectées par les pucerons contiennent des cécidomyies ou qu’il y a présence d’au moins une larve de cécidomyie par 20 à 40 pucerons.
Chrysopes
La larve (8 mm) est prédatrice. Elle ressemble à une petite chenille à l’abdomen effilé, munie de pinces à l’avant. L’adulte (10-20 mm) est d’apparence délicate. Il est reconnu par sa couleur verte ou parfois brune (dans ce cas, ce sont plus précisément des hémérobes), à ses longues antennes fines et à ses grandes ailes translucides posées, au repos, tel un toit en pente au-dessus de son corps allongé. Ses œufs blancs (1 mm) sont dressés un à un au bout de longs fils de soie (1 cm) et sont facilement observables sur la face inférieure des feuilles ou parfois à la surface des fruits.
Environ trois générations de chrysopes sont dénombrées par année au Québec. Les larves sont présentes à partir de la mi-juin et vont fluctuer en nombre selon l’abondance des pucerons jusqu’à la mi-octobre. Elles peuvent consommer jusqu’à 300 pucerons par jour. Il est estimé que les populations de pucerons verts peuvent être maintenues naturellement en dessous des seuils de nuisibilité lorsqu’il y a une larve de chrysope pour 70 pucerons. Ce prédateur peut aussi être utile pour maintenir sous un seuil acceptable les populations de certains ravageurs tels que cochenilles, acariens, cicadelles et jeunes stades larvaires de papillons (chenilles) ou d’autres insectes, mais peu de données existent pour quantifier cette utilité.
Syrphes
L’adulte (10 mm) est une mouche ressemblant, de par sa coloration, à une guêpe. Il se différencie toutefois facilement par son habitude à faire du vol stationnaire. Sa tête et ses yeux de mouche sont aussi plus gros que ceux d’une guêpe. La larve (6 mm) est un asticot sans pattes ni yeux, à tête effilée comme un cône, qui ressemble à une petite limace (figure). Elle est de couleur variable : gris, jaune, orange, vert ou une combinaison de ces couleurs, celles-ci formant généralement une série de lignes sur le dos. Ses œufs sont blancs et peuvent être facilement observés à travers les colonies de pucerons.
Le syrphe est utile de deux façons. Adulte, il agit comme pollinisateur, se nourrissant de pollen et de nectar. Au stade larvaire, la plupart des syrphes rencontrés en vergers sont d’excellents prédateur de pucerons verts et roses : certaines espèces peuvent en consommer entre 400 et 900 pendant les 3 à 4 semaines de leur développement. Plusieurs espèces de syrphes peuvent être présentes dans les vergers. Près de 18 espèces différentes ont été répertoriées au Québec, sans compter quelques espèces de Chamameidae très semblables. Toutes peuvent se nourrir de cochenilles, de chenilles et d’autres petits insectes. Une espèce régulièrement observée dans les vergers commerciaux se nourrit d’ériophyides et permet fréquemment une répression naturelle de ces ravageurs. Les syrphes sont actifs dès l’ouverture des bourgeons, les différentes espèces se succédant pendant toute la saison. Les plus efficaces sont retrouvées avant la fin de juillet et peuvent, jusqu’à ce moment, maintenir les populations de pucerons à de faibles densités.
Coccinelles
La plupart des gens reconnaissent facilement les coccinelles avec leur forme arrondie leur donnant l’apparence d’une demi-boule et leur couleur brillante (souvent rouge, parfois orangée, jaune ou noire), ornée de points noirs ou de marbrures. Une dizaine d’espèces peuvent être retrouvées dans les vergers. Elles se nourrissent de pucerons, d’acariens, de cochenilles ainsi que d’œufs de toutes sortes d’insectes. Les adultes (3-7 mm) et les larves (5 mm) sont prédatrices. Elles peuvent se nourrir d’une centaine de pucerons par jour. Au Québec, les coccinelles complètent une génération par année.
Les coccinelles peuvent être reconnues avant même qu’elles n’aient atteint leur forme adulte. Leur présence est facilement remarquable par :
- des amas de 10 à 50 œufs jaune-orangé, en forme de fuseaux, sous les feuilles, souvent près des colonies de pucerons.
- des larves à l’allure de minuscules crocodiles se déplaçant sur le feuillage. Les premiers stades larvaires sont uniformément foncés. Les stades subséquents peuvent développer une coloration gris-bleu foncé, souvent ornée de points jaunes, oranges ou rouges, et portent des verrues pourvues de poils (figure).
- des adultes jaune clair, sans point ni tache : ce sont de jeunes adultes de quelques heures.
Une fois qu’elles sont bien matures, vous pourrez distinguer plus facilement les principales espèces (figure) des vergers :
Coccinelle à deux points : Adulte rouge avec deux points noirs au centre.
Coccinelle à sept points : Adulte rouge avec sept points bien comptés. Elle se retrouve principalement au printemps, puis à la mi-septembre.
Coccinelle à quatorze points : Une espèce européenne en expansion rapide dans la vallée du Saint-Laurent. L’adulte est jaune et porte un motif noir ressemblant à un damier. Ne cherchez pas trop à trouver le nombre exact de points!
Coccinelle asiatique : Mentionnée pour la première fois au Québec en 1994 dans un verger de pommiers de Frelighsburg, cette espèce importée est maintenant la coccinelle la plus fréquente dans la majorité des vergers. C’est aussi la plus vorace, et une des plus grosses (5-7 mm). Elle se nourrit principalement de pucerons et d’acariens, mais aussi de larves de tordeuses et de plusieurs autres petits insectes. Sa coloration varie de jaune à noir, en passant par le rouge et l’orangé. Le nombre de ses taches peut aussi varier de 0 à 20.
Stethorus sp. : La plus petite de toutes les coccinelles (1 mm). L’adulte est complètement noir et la larve, qui ressemble à un minuscule porc-épic, peut dévorer jusqu’à 250 tétranyques de tous les stades chaque jour. Cette coccinelle est rencontrée surtout dans le sud-ouest du Québec. Très vorace, elle est par contre peu fréquente dans nos vergers.
Punaises prédatrices
La punaise de la molène et la punaise translucide, en plus des réduves et de certaines pentatomides prédatrices comme Podisus maculiventris, peuvent aussi se nourrir de pucerons en quantité non négligeable, en plus de se nourrir d’acariens. Pour plus d’informations sur les punaises prédatrices, consultez la fiche 96
Abondance et efficacité des prédateurs de pucerons au Québec
Pour les pucerons verts, il est estimé que les populations peuvent être maintenues naturellement en dessous des seuils de nuisibilité lorsqu’il y a présence de prédateurs de pucerons (syrphes, cécidomyies, coccinelles, chrysopes ou punaise de la molène) dans 90 % des colonies, et que les colonies sont de densité faibles à modérées.
Pour le puceron lanigère, il est estimé que les populations peuvent être maintenues naturellement en dessous des seuils de nuisibilité lorsqu’il y a présence de prédateurs (perce-oreilles et autres listés au tableau ci-après) ou de parasitoïdes dans les colonies au début août (un seuil précis n’est pas disponible).
Nom | Abondance1 | Proie préférée | Efficacité | Intérêt en PFI |
---|---|---|---|---|
Cécidomyies | ++++ | Pucerons | ++++ | ++++ |
Syrphes | ++++ | Pucerons | +++ | ++++ |
Punaises prédatrices2 | ++++ | Acariens | +++ | ++++ |
Pucerons | Variable | + | ||
Chenilles | + | + | ||
Coccinelles | ++ à +++ | Pucerons | ++ | ++ |
Chrysopes | + | Pucerons | ++ | + |
Légende : + : faible; ++ : moyen(ne); +++ : bon(ne); ++++ : élevé(e).
- L’abondance peut varier d’une saison à l’autre; par exemple, il peut arriver certaines saisons que les coccinelles soient plus abondantes que les cécidomyies et les syrphes.
- Punaise de la molène, punaise translucide, etc.
Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.
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