Fiche 41 Taille et conduite pour un développement et une mise à fruit optimaux

Dernière mise à jour le 1 mars 2024
 

Fiche 41

Paul Émile Yelle

 

Les techniques suivantes peuvent favoriser le développement optimal du pommier ainsi que sa mise à fruit : le tuteurage, le positionnement des branches, une taille d’hiver minimale, la taille d’été et l’enlèvement des fruits l’année de la plantation.

 

Tuteurage

Le tuteurage facilite une croissance verticale de l’axe principal, en réduisant le stress dû à l’exposition au vent. L’arbre atteint ainsi plus rapidement la hauteur nécessaire pour optimiser les rendements. Le tuteurage favorise l’équilibre entre la mise à fruit et la croissance végétative en maintenant plus facilement une hiérarchie structurale et hormonale dans l’arbre. Enfin, le tuteurage fournit un support physique indispensable aux pommiers nains et semi-nains, qui ne pourraient soutenir le poids d’une pleine récolte. Pour de plus amples informations, se référer à la section « Le tuteurage » dans le guide L’implantation d’un verger de pommiers.

 

Positionnement des branches

Des branches dont l’angle avec l’axe principal est trop fermé (plutôt à la verticale) tendent à pousser vigoureusement, impliquant plusieurs conséquences négatives. De telles branches ont tendance à supplanter l’axe principal et à empêcher l’arbre d’atteindre la hauteur souhaitée pour des rendements optimaux. Elles sont aussi moins fructifères et présentent un plus grand risque de cassure. De plus, ces rameaux vigoureux causent des étranglements sur le tronc à cause de leur grosseur excessive et ils limitent le développement de ramifications plus intéressantes.

Le positionnement consiste donc à attacher ou à écarter ces branches dont l’angle est inadéquat et de les ramener plus à l’horizontale. En effet, ce positionnement favorise la précocité de la mise à fruit, composante essentielle de la rentabilité des jeunes parcelles. Différents matériaux peuvent être utilisés à cette fin. Certains matériaux d’usage commun (élastiques, cordes, broches rigides, bâtons, poids) peuvent suffire. Par contre, des produits spécialisés sont aussi disponibles auprès des fournisseurs. Certains ont l’avantage de se dégrader d’eux-mêmes avec le temps, éliminant l’étape de repasser pour les enlever afin d’empêcher leur incrustation dans l’écorce et possiblement un étranglement de la branche.

Cependant, l’arcure, soit la pratique consistant à attacher les branches alors qu’elles sont encore jeunes est nettement préférable à une tentative de correction en forçant un écartement de branches devenues plus grosses. Il est possible ainsi de prévenir plus tôt les conséquences négatives déjà mentionnées, en plus d’économiser de la main d’œuvre et de diminuer les risques de bris.

positionnement des branches: arcure

Quelles branches faut-il positionner? Il est possible d’y aller de façon systématique en attachant toutes les jeunes branches qui ont poussé l’année de la plantation. C’est un procédé inutilement laborieux. Les branches beaucoup plus grosses que les autres et avec le pire angle doivent être enlevées tout simplement et celles qui sont près de l’angle visé ne doivent pas être touchées.

Quel angle viser? De manière générale il suffit de ramener les branches un peu sous l’horizontale, avec un angle d’environ 110°, en courbant le bout davantage au besoin. Cependant, des ajustements sont nécessaires selon le type d’arbre des différents cultivars. Certaines variétés au port plus retombant (par exemple, la « Cortland ») ont moins besoin de positionnement, alors que la pomme « Empire », au port plus dressé, présentera normalement plus de branches problématiques. Les arbres tronqués, produits en pépinière de manière à favoriser le développement de branches bien positionnées et propices à la précocité, nécessitent moins d’interventions.

Quand faire le positionnement? Normalement en juillet, une fois que la période de croissance plus rapide est terminée. Ceci permet d’éviter que la nouvelle croissance au bout des branches positionnées cherche à se dresser vers le haut. En plus, cela laisse suffisamment de temps d’exposition à la lumière de fin d’été pour encourager la formation de bourgeons à fruit.

Une fois en production, le poids des fruits suffit à positionner les branches. Il s’agit donc d’une opération particulièrement opportune sur les arbres plus jeunes encore en développement. Il faut la répéter tout de même les deux ou trois années suivant l’implantation sur la prolongation du tronc.

 

Enlèvement des fruits l’année de la plantation

Une saison de croissance plutôt courte comme celle présente au Québec oblige les pomiculteurs à favoriser au maximum le développement des jeunes arbres l’année de la plantation. Certains porte-greffes ou certains traitements en pépinière peuvent favoriser la présence de fleurs. Le fait de les laisser produire des fruits entraîne une réduction de la croissance. Tel que déjà mentionné, il est essentiel d’amener rapidement les jeunes arbres à la hauteur et au gabarit voulu afin de rentabiliser les nouvelles parcelles. Il est donc nécessaire d’enlever tous les fruits la première année. En plus, tant que l’arbre n’a pas atteint sa hauteur cible, il est souhaitable d’enlever les fruits sur la partie supérieure de la tige principale.

taille d'hiver

Taille d’hiver.

La taille d’hiver, qui est pratiquée de la fin janvier à la fin avril, peut aller à l’encontre du but visé si celui-ci est de réduire l’envergure de l’arbre et qu’une forte taille est pratiquée. La taille provoque alors un regain de vigueur et entame un cercle vicieux, favorable à la végétation plutôt qu’à la production de fruits. En ayant plutôt comme objectif principal la pénétration de la lumière, il sera possible grâce à la taille d’hiver de favoriser une meilleure production d’une plus grande qualité.

Il est possible d’atteindre ce but :

  • En éliminant ou en réduisant les branches plus hautes qui surplombent et ombragent de bonnes branches plus basses dans l’arbre.
  • En coupant au tronc les branches trop dressées et vigoureuses, telles que décrites à la section « Positionnement des branches » plus haut et qui par indécision, ont été laissées en place et ont pris de l’envergure.
  • En enlevant les branches peu productives, qui s’éloignent peu du tronc et qui entravent la pénétration de la lumière vers le centre de l’arbre (effet cheminée).
  • En enlevant les ramifications qui partent vers le bas ou l’intérieur et se retrouvent sous une branche productive.

taille d'hiver (avant)

Avant la taille d’hiver.

Notez toutefois que l’élimination des gourmands qui réduisent la pénétration de la lumière devrait se pratiquer à l’été afin de réduire le potentiel et la vigueur de leur repousse (voir la section « Taille d’été » ci-après).

Pour ce qui est de la distribution de la vigueur sur l’axe, tant que l’arbre est jeune et encore en développement, le maintien d’une bonne vigueur à la tête est prioritaire. Il faut aussi s’assurer de respecter une hiérarchie où les branches plus basses sont plus vigoureuses que celles situées plus haut. La vigueur des branches est déterminée selon leur diamètre et leur angle. De manière générale, il faut se méfier des branches dont le diamètre atteint la moitié du diamètre du tronc à leur point d’attache.

 

Favoriser l’équilibre entre mise à fruit et vigueur

L’équilibre entre la mise à fruit et la vigueur de l’arbre assure que les arbres qui atteignent le gabarit propice à un plein rendement ou presque possèdent une végétation assez vigoureuse pour favoriser le développement des fruits et la formation de bourgeons floraux. En maintenant cet équilibre, ceci se produit sans avoir une vigueur excessive qui favorise la production de bois et de pousses au détriment de la production fruitière. Outre les recommandations décrites à la fiche 43, d’autres pratiques peuvent contribuer à un bon équilibre de l’arbre, telles que la taille, le positionnement, l’extinction et le pliage de l’axe principal.

Taille en été. De fait, une certaine taille peut s’exercer durant presque toute l’année à l’exclusion des mois d’automne et du début janvier. La taille à ces périodes peut accroître le risque de dommages par le froid durant l’hiver au niveau des coupes. La taille dite « d’hiver » peut se poursuivre après le débourrement sur les variétés particulièrement vigoureuses comme « Spartan », car une taille tardive aura un effet stimulant le regain de croissance bien moins fort que si cela est fait plus tôt. Les seules restrictions à ce type de taille sont les dégâts potentiels aux bourgeons, aux fleurs ou aux fruits causés par l’enlèvement de branches coupées. Il faut aussi tenir compte du potentiel réduit pour la cicatrisation des coupes et restreindre le diamètre des branches coupées.

verger

Taille d’été. Ce que l’on entend normalement par la taille d’été se fait surtout en juillet et en août et vise principalement à favoriser une bonne coloration des pommes et à éliminer les pousses résultant d’un excès de vigueur. Ce type de taille ne vise évidemment pas les arbres qui manquent de vigueur. Les principales coupes pratiquées lors de la taille d’été sont :

  • les gourmands
  • les prolongations excédentaires sur les branches fruitières
  • les prolongations dressées au bout des branches fruitières
  • toute nouvelle croissance sur ramifications dressées portant des fruits

taille d'été (avant)

Avant la taille d’été.

taille d'été (avant)

Toutefois il faut éviter d’enlever les nouvelles pousses issues de bouquets floraux portant des fruits, car elles sont la source directe d’énergie pour un bon développement de ces fruits.

NOTE : les traitements avec le régulateur de croissance APOGEE, sans se substituer complètement à la taille d’été, peuvent en réduire le besoin.

Positionnement. Se référer à la section « Positionnement des branches » ci-haut.

Extinction. Cette technique consiste à réduire le nombre de coursonnes pour réduire l’excès potentiel de charge, telle que démontré dans la figure ci-après. À son minimum, elle consiste à éliminer toutes les bourses qui sont à la face inférieure des branches ou des rameaux fruitiers et qui ne peuvent pas produire de fruits de couleur ni de calibre adéquats. Sur les cultivars où les bourses forment annuellement de nouveaux bourgeons il est toutefois possible de pousser plus loin et d’en enlever davantage.

taille des pommiers: extinction

L’extinction; une technique de taille des pommiers – Source : Le pommier – taille et conduite.

Pliage de l’axe principal. Quand tout se déroule bien et que porte-greffe, densité, système de conduite et précocité « collaborent » comme planifié, la tête devrait commencer à manquer de vigueur et à porter des fruits un peu plus haut que le tuteur ou le fil de fer, vers 3,5 m selon les systèmes. Dans ces conditions elle se courbe naturellement et il n’en ressort que des réitérations peu vigoureuses. Sinon, il est possible de la recourber et de l’attacher au tuteur ou au fil de fer supérieur afin de ralentir la croissance végétative et de favoriser la mise à fruit.

 

Désinfection des outils de taille

Faut-il désinfecter les outils afin d’éviter de propager des maladies lors de la taille? Ce n’est généralement pas nécessaire, sauf dans certaines situations. Lisez la réponse détaillée à la fiche 106 sur la lutte au feu bactérien

Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.

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2 réponses
  1. danielguillot dit :

    Bonjour M Yelle,
    Si je comprends bien, je peux continuer la taille d’été (gourmands, branches excédentaires..) jusqu’à la fin du mois d’août sans nuire à l’aoûtement des pommiers. Ai-je raison?

    Merci de votre aide

    Daniel Guillot

  2. Paul Émile Yelle dit :

    Bonjour M. Guillot,

    Vous avez effectivement bien compris.

    La taille d’été apporte des bénéfices particulièrement pour la coloration, même jusqu’à la fin du mois. De plus, l’enlèvement des gourmands à ce temps-ci défavorise la repousse additionnelle qu’on aurait si on les enlève à l’hiver.

    Pas de stimulation : pas de retard de l’aoûtement.

    P.E.Yelle, agronome

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