Fiche 91 Stratégie globale de lutte contre les acariens

Dernière mise à jour le 20 mars 2024
 

Fiche 91

Yvon Morin, Gérald Chouinard et Stéphanie Gervais

 

Le tétranyque rouge, le tétranyque à deux points et l’ériophyide sont les principaux acariens ravageurs des vergers. Depuis quelques années, un autre tétranyque qui ressemble au tétranyque à deux points, le tétranyque de McDaniel, est également présent dans plusieurs vergers. Par temps chaud, les acariens se multiplient rapidement et peuvent endommager sévèrement le feuillage des pommiers. Le stress causé par ces ravageurs peut réduire le rendement de plusieurs façons :

  • en réduisant le calibre des fruits;
  • en causant la chute prématurée des pommes;
  • en réduisant le nombre de bourgeons à fruits viables pour la prochaine récolte.

 

Dépistage

Même si ce n’est pas à ce moment que les symptômes de leur présence sont les plus frappants, c’est durant les mois de mai et de juin que les pommiers sont les plus sensibles aux infestations par les acariens. Comme les acariens peuvent avoir un impact économique important, en PFI, une bonne gestion passe obligatoirement par le dépistage des œufs et des formes mobiles. Cette technique consiste à l’observation d’un minimum de 25 feuilles par bloc (2 à 5 feuilles par arbre), en examinant à l’aide d’une loupe (10X ou 15X) la face inférieure des feuilles. Le tableau Dépistage par observation des fruits ou du feuillage de la fiche 65 présente les détails et les seuils d’intervention.

 

Première étape: intervention à l’huile supérieure

La première intervention sera le plus souvent une application d’huile supérieure contre les œufs d’hiver du tétranyque rouge (si le dépistage révèle des populations supérieures au seuil d’intervention). Si cette intervention n’est pas faite ou n’est pas efficace, il est alors possible d’appliquer un acaricide chimique tel que décrit ci-après.

Des interventions estivales pourront par la suite être effectuées, toujours en fonction du dépistage et des seuils d’intervention. Le nombre d’interventions acaricides requises variera énormément selon les situations : la saison, la qualité de l’application, le produit utilisé, la pluie, les espèces en cause, les populations de prédateurs, etc.

Protection des prédateurs

Les acariens prédateurs (décrits à la fiche 96) jouent un rôle important dans cette panoplie d’acteurs : si vous leur permettez de se développer dans un environnement favorable, ils pourraient vous permettre de vous passer d’acaricides pendant tout l’été! Il en résulte une économie d’argent, à court et à long terme. La conservation des prédateurs entraîne la réduction des pesticides pour la saison présente et pour les saisons subséquentes. Les pratiques suivantes permettent de les protéger :

  • Appliquer des insecticides et des acaricides seulement lorsque les seuils d’intervention sont atteints ou qu’il y a un historique important de dommages;
  • Réserver l’usage du carbaryl (SEVIN) pour éclaircir seulement les variétés qui ne peuvent être éclaircies autrement; n’utilisez jamais le SEVIN en été (ce n’est plus permis!);
  • Choisir les fongicides les moins toxiques pour eux;
  • Intervenir uniquement s’il est évident qu’ils ne contrôlent pas les populations d’acariens ravageurs;
  • Pendant l’été, éviter autant que possible d’utiliser des insecticides toxiques aux prédateurs d’acariens. Les insecticides qui détruisent plusieurs espèces de prédateurs sont à proscrire : une pyréthrinoïde de synthèse par exemple, appliquée l’été même à faible dose, entraîne à coup sûr une augmentation des acariens phytophages.
  • Si le seuil d’intervention est atteint malgré la présence de prédateurs, cela peut signifier qu’ils ne sont pas assez nombreux pour réaliser un contrôle biologique. Si un acaricide doit être appliqué, il vaut mieux choisir un produit qui n’est pas toxique pour les prédateurs présents.
  • Lorsque possible, il vaut mieux chercher à réduire la population des acariens plutôt que de les éliminer, pour laisser une source de nourriture à vos prédateurs. Pour ce faire, vous pouvez traiter localement, ou même traiter aux deux rangs dans le but de laisser des proies pour les prédateurs et soulager immédiatement les arbres.
  • Il vaut mieux cesser toute intervention chimique contre les acariens à partir de la fin août. Il est alors trop tard pour intervenir. De plus, une forte baisse des populations en automne pourrait forcer certains prédateurs à aller pondre ailleurs, et à vous priver de leur utilité l’année suivante.

 

Deuxième étape: lutte à l’aide d’acaricides

Plusieurs acaricides sont disponibles pour contrôler les tétranyques. L’important est de n’intervenir que lorsque le dépistage le justifie, et à l’exception de l’huile, de ne jamais utiliser le même produit deux fois consécutives, car la résistance aux acaricides se développe rapidement.

Traitement en début de saison

Les acaricides utilisables en début de saison (jusqu’à la nouaison) sont l’APOLLO et l’AGRI-MEK. Bien qu’encore homologué, APOLLO n’est malheureusement pas disponible sur le marché depuis plusieurs années.

L’AGRI-MEK est efficace sur les formes mobiles des tétranyques et de l’ériophyide et possède une excellente activité résiduelle. Appliqué entre les stades calice et nouaison en mélange avec de l’huile (concentration de 0,8 %), il permet habituellement un contrôle durant toute la saison.

Des applications de ces deux produits peuvent aussi être recommandées même si le seuil n’est pas atteint, mais uniquement dans le but d’éviter l’utilisation répétée d’un même acaricide d’été (décrits ci-après).

Traitement en période estivale

Les acaricides à utiliser en période estivale sont les suivants : KANEMITE (acéquinocyl), NEXTER (pyridabène), ACRAMITE (bifénazate), NEALTA (cyflumetofen) et ENVIDOR (spirodiclofène). Ces acaricides ont des spectres d’activité différents, par exemple :

  • ACRAMITE est surtout efficace contre le tétranyque à deux points.
  • NEALTA est surtout efficace contre le tétranyque rouge.
  • NEXTER est efficace à la fois contre le tétranyque rouge et l’ériophyide.
  • ENVIDOR est plus efficace contre les œufs que les adultes.
  • KANEMITE a une efficacité à la fois contre les œufs et les formes mobiles de tétranyques, mais aucune efficacité contre l’ériophyide.

Pour vous permettre de choisir l’acaricide qui vous convient le mieux il est donc très important de vérifier la composition des acariens présents dans votre verger à l’aide d’un bon dépistage. Une fois ce travail fait, vérifiez les caractéristiques des différents acaricides présentés dans la fiche 47 pour faire le meilleur choix. Par exemple, dans le cas d’un problème important de tétranyque rouge en juillet et en l’absence d’acariens prédateurs, NEXTER pourrait être un bon choix, mais, s’il y a présence de nombreux tétranyques à deux points avec de l’ériophyide, ENVIDOR serait plus approprié.

Huiles d’été. Une autre approche est également possible, soit l’utilisation de l’huile d’été (par exemple l’huile minérale ultra raffinée ou l’huile de canola ) sur pommiers. La stratégie habituelle pour l’huile d’été consiste à l’ajouter à la bouillie chaque fois que le pulvérisateur est utilisé, si c’est nécessaire (une application tous les 10 à 14 jours est suffisante). Cette huile peut en effet s’appliquer durant toute la saison sauf durant la floraison. Par contre, comme c’est le cas de toutes les huiles, ces produits ne doivent pas être utilisés dans les 14 jours précédant ou suivant une application de captane ni dans les 30 jours précédant ou suivant une application de soufre. D’autres incompatibilités existent selon la formulation utilisée, il faut donc lire l’étiquette avant de faire son choix. La dose maximale homologuée est de 10 L/ha, sans dépasser une concentration de 1 %. En raison de ces contraintes, cette huile est malheureusement difficile à intégrer dans un programme de traitement, mais  lorsque c’est possible, cela représente néanmoins une approche très intéressante.

 

Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.

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