Dans les vergers où le feu bactérien est présent à chaque année, un gel important pendant la fleur peut provoquer une infection de la maladie. Ces cas assez rares ne sont pas couverts dans les modèles usuels, mais sont bien décrits dans la littérature sur le “trauma blight” (1). L’infection a lieu par la “blessure” (tissu gelé) sans égard à la population bactérienne présente. Un traitement de streptomycine dès que possible le jour du gel ou le lendemain peut alors limiter les dégâts. Les dommages de feu en lien avec le gel vont devenir visibles dans approximativement 10 jours (72 degrés-jours base 12.7°C (2)).
La pluie prévue demain provoquera une forte éjection des spores de tavelure dans toutes les régions pomicoles du sud du Québec, jusqu’à un quart de toutes les ascospores de la saison seront éjectées. Cependant, la chute de la température pendant la pluie et le séchage assez rapide pourraient complètement annuler les risques d’infection. Dans la plupart des scénarios, le risque associé à cette pluie est donc faible (RIM < 30) et cette infection sera facile à réprimer. Le risque “léger” de l’ancienne échelle de Mills ne sera même pas atteint. Le froid et l’absence de vent après l’infection rendent possible une stratégie de traitement après la pluie (en post infection) facilement jusqu’à jeudi en cours de journée. Encore une fois, un seul traitement bien positionné d’un mélange de bicarbonate et de soufre est tout ce qu’il faut pour réprimer la tavelure.
Le feu bactérien du pommier (Erwinia amylovora) est une maladie qui a un potentiel dévastateur immense. Cette maladie peut tuer les pommiers infectés en quelques semaines quand les conditions sont propices.
La plupart des infections ont lieu lors de la floraison quand tous les facteurs sont réunis:
- Historique de feu bactérien ou arbres porteurs à proximité du verger
- Fleurs écloses récemment visitées par des insectes porteurs
- Température suffisante pour la multiplication des bactéries
- Légère humectation qui permet l’infection.
Dans les vergers qui sont à risque parce que la bactérie est présente (#1), plusieurs fleurs commencent à éclore dans le sud du Québec aujourd’hui (#2) et la température au cours des prochains jours sera favorable aux bactéries (#3). Selon le modèle RIMpro, la période d’humectation prévue le vendredi 12 mai en fin de soirée pourrait permettre l’infection des fleurs (#4). Dans les vergers où tous les facteurs de risque sont réunis, un traitement pourrait être requis. Ce traitement doit être fait idéalement avant l’infection, mais pour minimiser le nombre d’interventions il est préférable d’attendre l’ouverture d’un maximum de fleurs avant de traiter. Les fleurs traitées demeurent protégées pour toutes les périodes d’infection qui suivront.
Le blanc du pommier (aussi appelé oïdium) n’est pas une maladie problématique dans la plupart des vergers. Cependant, dans les blocs où le blanc s’est installé il n’est pas facile de s’en débarrasser. N’attendez pas que les symptômes apparaissent dans les vergers avec un historique de la maladie pour intervenir. Au cours des prochains jours, le blanc aura de bonnes conditions pour se propager aux nouvelles pousses à partir des bourgeons infectés l’an dernier. Les traitements dirigés contre cette maladie devraient être limités aux vergers avec un historique et aux cultivars sensibles (ex: Cortland, Ginger Gold).
La stratégie d’intervention n’est pas aussi élaborée que pour la tavelure, mais l’objectif est de protéger les nouvelles feuilles lors des périodes de sporulation et d’infection. La période de temps qui s’écoule entre l’arrivée des spores, l’infection, l’apparition des nouveaux symptômes et la propagation est très courte. Tout se passe en quelques jours quand les conditions sont favorables à la maladie. Le logiciel RIMpro peut vous aider à cibler les périodes favorables au blanc, mais le modèle n’est pas aussi fiable que pour la tavelure.
Plusieurs produits sont efficaces et il n’est pas nécessaire de recourir aux molécules systémiques quand les traitements sont relativement bien dirigés.
Traitements dirigés (non systémiques):
Bicarbonate de potassium (B2K): Le B2K appliqué seul est très efficace et l’ajout de soufre n’augmente pas l’efficacité contre le blanc.
Soufre: Limité à 8 applications par année. Si vous utilisez le soufre pour lutter contre la tavelure (ex: B2K + Soufre), cette limitation peut devenir problématique.
Bouillie soufrée: Cette formulation de soufre échappe à la limite de 8 traitements. La bouillie est efficace contre le blanc, mais chère.
Traitements systémiques:
Plusieurs fongicides systémiques (groupes 3,7,11) sont efficaces contre le blanc. Si vous avez abandonné le Flint pour lutter contre la tavelure par crainte de résistance, cette option est néanmoins à considérer pour le blanc.
Les fongicides homologués pour lutter la tavelure sont nombreux et ce n’est pas toujours facile d’identifier les plus efficaces ou ceux qui sont les plus “rentables” (cout vs efficacité). La comparaison est encore plus compliquée quand vient le temps de choisir les meilleurs produits à utiliser après la pluie, en post-infection. Les produits qui sont proposés dans les mélanges ne sont pas tous efficaces en post infection et ne font qu’augmenter la facture. La liste qui suit constitue le palmarès des pires options en post infection. Si un de ces produits est proposé (seul ou en mélange), posez-vous des questions…
En ordre alphabétique des pires produits testés à l’IRDA*:
Buran
Cuivre (trois formulations testées)
Folpan
Oxidate
Penncozeb (tous les mancozèbes)
Serenade
Soufre (ex: Kumulus)
La pluie prévue aujourd’hui et au cours des prochains jours va provoquer une éjection de spores et des conditions d’infection très favorables à la tavelure du pommier. Les traitements réalisés hier en protection pourront certainement tuer les spores éjectées aujourd’hui, mais la croissance entre le moment de votre traitement et l’arrivée de nouvelles spores va déterminer une bonne partie de votre succès à réprimer la tavelure. Le plus grand risque d’échec de vos traitement provient de la croissance du feuillage et non du lessivage des produits par la pluie.
Chaque nouvelle feuille qui émerge après le traitement est une cible non protégée. Dans les vergers “propres” (exempts de tavelure l’an passé), le risque que cette cible soit touchée est plus faible. Dans les vergers avec un historique de tavelure, le nombre de spores augmente la probabilité qu’elles atteignent les nouvelles feuilles.
RIMpro peut vous aider à estimer la proportion de spores éjectées avant ou après votre seuil de tolérance que la croissance entraine un trop grand risque. Si les éjections ont surtout lieu dimanche ou lundi et que ces spores bénéficient d’un temps d’infection suffisant sur du feuillage à découvert, un traitement pendant ou après la pluie serait nécessaire.
Le graphique en annexe montre des éjections importantes samedi et dimanche (jaune), mais les spores en attente d’infection (zone blanche) diminuent pendant les périodes sèches. L’infection (ligne rouge) reste donc minimale. La pluie en continu prévue lundi provoque une autre éjection, mais des conditions d’infection beaucoup plus favorables. Cette infection est visible avec la montée spectaculaire de la ligne rouge.
Les prévisions de RIMpro sont disponibles ici. Choisissez “tavelure” dans le menu déroulant et cliquez sur la station directement sur la carte pour y accéder.
Dans la plupart des vergers du sud du Québec, le risque de tavelure de la période de pluie du 23 au 27 avril est en lien avec les ascospores éjectées dimanche le 23. Une fois ces spores tuées, doit-on s’inquiéter? Cette réponse est unique à chaque verger, mais le risque de tavelure à venir est faible. L’image en annexe montre l’intensité de l’éjection et de l’infection pour les prochains jours. Le risque cumulé augmente très peu puisque la maturation des spores, l’éjection et l’infection sont ralenties. Comme la croissance sera aussi ralentie et que le cumul de pluie sera faible, un traitement en protection aujourd’hui pourrait suffire pour couvrir tout le risque à venir. Si vous avez opté pour un traitement de bicarbonate (avec soufre ou pas), l’effet en protection est marginal et il est préférable d’attendre la pluie pour juger de la pertinence d’intervenir à nouveau. L’absence de vent jusqu’à mercredi facilite toutes les stratégies envisagées.
L’éjection des ascospores de la tavelure s’arrête presque complètement la nuit et par temps froid. Dans plusieurs secteurs, la température demain ne permettra pas l’éjection des spores. Le risque pour l’infection en cours est donc en lien avec des spores déjà éjectées. Si vous avez tué ces spores par un traitement bien positionné, il est inutile de les traiter une seconde fois. Un prochain traitement n’est nécessaire que si d’autres spores sont éjectées. Si vous n’avez pas appliqué de traitement fongicide à date, il est toujours temps de tuer l’infection. Un traitement de bicarbonate (préférablement en mélange avec du soufre) appliqué d’ici à demain soir pourra tuer toutes les spores en cours d’infection. Le lessivage de ce traitement n’a aucune importance puisque les spores visées seront tuées.
La pluie abondante prévue pour demain est précédée de vent intense, mais la météo est beaucoup plus calme par la suite. La meilleure stratégie pour combattre l’infection prévue est peut-être d’éviter le vent et le lessivage et profiter du froid pour intervenir pendant l’infection.
Les traitements appliqués tôt après les éjections sont les plus efficaces, même si ils sont réalisés souvent pendant la pluie. Plusieurs traitements sont possibles, sans nécessairement nuire à votre budget et sans favoriser la résistance.
Le bicarbonate de potassium (préférablement en mélange avec du soufre*) est parfait pour l’occasion.
Consulter le tableau sur les caractéristiques des fongicides🔗 pour faciliter votre choix de produit. Tant que l’intervention est réalisée dans les délais prescrits dans la case orange présentée pour chaque produit, l’efficacité sera aussi bonne qu’un traitement en protection.
Les avantages de traiter pendant ou après la pluie:
- Le lessivage n’a pas d’impact.
- Les nouvelles feuilles sont toutes traitées.
Les désavantages sont en lien avec le temps requis pour traiter toutes les surfaces dans un temps raisonnable, la résistance, le coût de certains traitements et les risques que la météo ne vous permette pas d’intervenir rapidement. Cette approche n’est pas pour tout le monde et n’est pas applicable tout le temps… Mais l’avantage de la pluie de demain: une belle fenêtre de temps froid sans vent pour bien positionner votre traitement.
Le graphique en annexe présente un traitement de bicarbonate de potassium appliqué lundi matin. Rien n’empêche de l’appliquer plus tôt, tant que l’application est faite après l’éjection des ascospores. Ajouter du soufre* au bicarbonate augmente toujours considérablement l’efficacité.
* Dans les vergers où l’huile de dormance a été appliquée, les risques de phytotoxicité avec le soufre sont bien réels. Assurez-vous au minimum que l’huile est bien lessivée avant d’inclure du soufre dans vos interventions.
En moyenne, le débourrement du pommier survient au même moment que l’apparition des premières spores (ascospores) de la tavelure du pommier. Mais cette coïncidence est loin d’être parfaite. Les ascospores sont parfois prêtes à l’éjection 3 semaines avant et jusqu’à 3 semaines après le débourrement selon les années et les localités.
L’accumulation hâtive des spores a pour conséquence que la première pluie suivant le débourrement provoque une éjection plus intense et donc souvent une infection plus grave qu’attendue et dont on ne se méfie pas assez. Historiquement, les “années à tavelure” commencent par des spores précoces.
Mieux vaut prévenir que guérir :
Les traitements fongicides ne sont pas utiles avant l’apparition des premières feuilles (stade débourrement), mais c’est actuellement un bon moment pour finaliser la préparation de votre pulvérisateur. Ne planifiez pas en fonction de « sauter » le premier traitement de l’année, surtout dans les vergers avec un historique de problèmes.
Broyage de la litière et urée en complémentarité :
Le broyage des feuilles de la litière avant le début de la saison permet de détruire une grande partie des spores qui sont à l’origine des infections de tavelure au printemps. En principe, l’application d’urée au sol a le même objectif, mais les résultats sont moins « visibles » puisque la dégradation de la litière prend plusieurs jours. Selon l’équipement disponible, il peut être techniquement plus simple de broyer au centre des rangées et appliquer l’urée sur le rang. Dans les deux cas, l’effort investi pour rejoindre un maximum de feuilles est déterminant.
La recette à pulvériser :
Pour l’urée, le traitement « classique » est fait avec une solution de 50 kg par hectare dans un volume d’eau suffisant pour dissoudre l’urée. Il est possible de dissoudre 50 kg d’urée dans aussi peu que 75 litres d’eau à 0 °C, mais c’est plus facile avec les volumes usuels (ex. : 250 l/ha). La préparation est donc facile à faire à n’importe quelle température. L’efficacité est proportionnelle à la quantité d’urée appliquée; diminuer la quantité d’urée par hectare diminue l’efficacité de la technique. À 50$/ha, c’est pas cher et la fertilisation est en “prime”.
Pour les traitements au sol, vous pouvez l’appliquer avec votre pulvérisateur conventionnel de deux manières : soit en utilisant seulement les jets du bas ou, mieux, en branchant une simple rampe horizontale (style herbicide) avec des buses qui couvrent toute la largeur de la rangée.
Il est également possible d’utiliser votre pulvérisateur d’herbicide et de le modifier pour couvrir plus large. Cette dernière solution est moins intéressante parce que le réservoir est souvent trop petit. L’objectif est de bien couvrir la zone où l’on trouve les feuilles de litière, souvent le long du rang. L’application d’urée après le déchiquetage donne les meilleurs résultats. Évitez d’appliquer l’urée juste avant une pluie. Comme l’urée est très soluble, elle serait alors rapidement éliminée par ruissellement. Cependant, le temps de contact requis entre l’urée et les feuilles de litière pour maximiser l’efficacité n’a pas été étudié spécifiquement. L’urée appliquée à la volée en granules n’est pas absorbée également par la litière et n’est donc pas aussi efficace.
Urée au débourrement comme source d’azote :
Comme l’azote appliqué au sol n’est pas immédiatement disponible pour l’arbre, il est préférable d’appliquer l’engrais le plus tôt possible en saison. L’application de 50 kg/ha d’urée au stade débourrement donne 23 unités d’azote assez tôt pour que l’arbre en bénéficie au moment opportun. Les autres formes d’azote appliquées au sol plus tardivement sont assimilées trop tard pour l’arbre et peuvent entrainer différents problèmes. L’azote appliqué au sol sous forme de nitrate n’a aucun effet sur la tavelure.
Les traitements d’urée foliaire peuvent combler une partie des besoins en azote de l’arbre après le stade débourrement et sont partiellement efficaces contre la tavelure. Consultez la fiche sur la fertilisation et la phytoprotection pour les détails.
