Fiche 72 Le charançon de la prune

Dernière mise à jour le 1 mars 2024
 

Fiche 72

Yvon Morin, Gérald Chouinard et Daniel Cormier

 

Cet ennemi du pommier est réglementé en vertu de la Loi sur la protection sanitaire des cultures (Fiche 15) et les mesures nécessaires doivent être prises pour éviter la propagation aux cultures avoisinantes.

 

Voyez le charançon sur Youtube à https://www.youtube.com/watch?v=PUzZJXeNmEQ
La capsule vidéo de 6 minutes dresse un portrait du ravageur, montre ses caractères distinctifs, identifie les conditions qui influencent son développement, et vous plonge dans l’action du dépistage et des méthodes d’intervention recommandées en production fruitière intégrée.
Description et comportement

Le charançon de la prune (Conotrachelus nenuphar) est un ravageur primaire en PFI, présent dans la grande majorité des vergers du Québec (pommes, poires et prunes). L’adulte mesure 5 mm de longueur. Il est de couleur noire, brune ou grisâtre avec un dos (élytres) bossu et rugueux, et un bec (rostre) recourbé qui mesure le tiers de sa longueur. Puisqu’il est actif surtout en soirée et durant la nuit, il est rarement visible lors des dépistages.

Les adultes hibernent principalement dans la litière des boisés et des forêts d’arbres feuillus qui avoisinent les vergers, ou sous des amas de branches ou des bâtiments. La plupart de ceux qui restent dans le verger pendant l’hiver ne survivent pas, sauf si le temps reste doux et/ou que la neige est abondante tout l’hiver.

Adulte du charançon de la prune – photo J. Moisan-De Serres, MAPAQ

À la faveur de journées chaudes et calmes du printemps, les charançons se déplacent vers le verger. L’accouplement débute habituellement durant la floraison, et la ponte dès la nouaison des fruits. Une seule femelle peut pondre jusqu’à 200 œufs en quelques semaines. Les œufs sont pondus individuellement sous la pelure des jeunes fruits et l’éclosion survient de 3 à 12 jours après la ponte. La larve pénètre la pomme et s’en nourrit pendant 2 à 3 semaines. De couleur blanc-jaune avec une petite tête brune, elle atteint une longueur de 5 à 7 mm. Elle se dirige ensuite vers le sol pour se transformer en nymphe.

Œuf de charançon de la prune (la pelure a été abaissée afin de le rendre visible)
photo IRDA

Larve du charançon de la prune – photo J. Moisan-De Serres, MAPAQ

Nymphe du charançon de la prune – photo IRDA

Au début du mois d’août, les nouveaux adultes commencent à émerger et à se nourrir de pommes. Ces adultes sont toutefois incapables de se reproduire et de pondre des œufs avant d’avoir complété leur développement, pendant l’hiver. Il n’y a donc qu’une seule génération par année.

Des photographies des différents stades de développement et des dommages que cause le charançon se trouvent dans le Guide d’identification des ravageurs du pommier et de leurs ennemis naturels.

Cycle de vie du charançon de la prune – illustration J. Veilleux / IRDA

 

Dommages

Il existe trois types de dommages sur les fruits : le dommage de ponte, le dommage de nutrition des larves et le dommage de nutrition des adultes.

Dommage de ponte

Ce dommage apparaît lorsque la femelle insère son œuf sous la pelure de la pomme et qu’elle mange ensuite la pelure autour de l’œuf. Cette opération forme une cicatrice caractéristique en forme de croissant de lune, qui permet à l’œuf de ne pas être écrasé lorsque le fruit grossit.

Dommage de ponte du charançon de la prune en forme de croissant de lune
photo F. Vanoosthuyse, IRDA

 

Dommage de ponte du charançon de la prune cicatrisé – photo F. Pelletier, IRDA

Dommage de nutrition des larves

Les larves qui éclosent des œufs se nourrissent de la chair du fruit, ce qui provoque habituellement sa chute avant la récolte.

Pour plusieurs raisons (défense physiologique, insecticides), une grande quantité d’œufs et de larves vont toutefois mourir avant de compléter leur développement, et des pommes avec des dommages de ponte resteront dans l’arbre jusqu’à la récolte.

Dommage de nutrition des adultes

Ces dommages de forme circulaire sont causés par les adultes qui se nourrissent des fruits en enfonçant leur rostre dans la chair. Les adultes qui émergent au mois d’août font seulement ce type de dommage (principalement près de la queue de la pomme), tandis que les adultes du printemps font surtout des dommages de ponte.

 

Estimation du risque

La méthode de dépistage de ce ravageur est décrite au tableau-synthèse Dépistage par observation visuelle des fruits ou du feuillage de la fiche 65.

Le potentiel de dommage de cet insecte est très élevé et son dépistage reste encore laborieux. Pour ces raisons, un traitement préventif postfloral à effet résiduel est souvent recommandé comme principal moyen de lutte, mais des traitements de bordure (rangées périphériques) sont aussi recommandables selon la pression de la population et l’historique de dommages.

 

stratégie d’intervention
Prévention

Éviter l’implantation de nouveaux vergers trop près de boisés de feuillus qui augmentent la survie du charançon à l’hiver. Placer les cultivars les plus attrayants pour le charançon (comme les cultivars d’été) dans les rangées de bordure. Ces arbres serviront d’indicateur de la présence de l’insecte.

Créer une bordure défavorable à la survie du charançon durant l’hiver en plantant autour du verger une ceinture d’arbres de type résineux.

Éliminer les foyers d’infestation à proximité du verger (moins de 200 m), particulièrement les pommiers, les pommettiers, les cerisiers, sauvages ou abandonnés et tous les arbres de la famille des rosacées.

Ramasser les fruits affectés.

Répression

Si une intervention contre le charançon est nécessaire, le choix de la stratégie à utiliser (traitement complet ou traitement de bordure) dépendra de la situation.

Un traitement complet est requis dès qu’une des situations suivantes est rencontrée :

  • le verger possède un historique de dommages importants du charançon;
  • le verger a subi des dommages de charançon l’année précédente;
  • le verger est adjacent à un verger à risque;
  • les captures d’hoplocampes (ou d’un autre insecte) dépassent le seuil d’intervention;
  • le verger n’a pas reçu de traitement insecticide préfloral.

Un traitement de bordure est recommandé dans les autres cas. Le traitement en bordure permet l’établissement des insectes et acariens utiles au centre du verger tout en réduisant les coûts reliés à l’achat de pesticides. Il doit être appliqué dans les 20 à 30 mètres ceinturant le verger, soit 3 rangs de pommiers standards ou 5 rangs de pommiers nains ou semi-nains. Il doit également inclure les cultivars hâtifs.

Le traitement de bordure est efficace et rentable pour des blocs de grandes surfaces. Il est aussi plus efficace lorsque quelques journées consécutives de temps très chaud ont été rencontrées avant ou pendant la floraison. Il est cependant moins efficace si le verger est de forme irrégulière, étroit ou s’il y a une forte proportion de cultivars hâtifs, de petits pommiers ou un historique de dommages au centre du verger.

Cette pratique donne de bons résultats et peut être utilisée à condition que le verger soit inspecté de façon régulière (2 à 3 fois par semaine) à partir du stade calice et durant le mois de juin. Elle peut occasionner une augmentation de la population l’année suivante. Tous les deux ou trois ans, il est préférable de traiter l’ensemble du verger, selon l’historique des dommages.

Moment du traitement

Si l’ensemble du verger est traité, le traitement doit avoir lieu entre les stades calice et nouaison. Le traitement en bordure doit avoir lieu au stade calice, avant que le charançon pénètre à l’intérieur du verger.

Le traitement doit être fait lors d’une soirée chaude, humide et sans vent, entre 18 h et minuit. C’est à ce moment que le charançon s’active dans les pommiers. À cette période de l’année, le charançon se tient généralement immobile au sol durant le jour.

Les insecticides recommandés sont les mêmes que ceux qui sont utilisés pour lutter contre les populations de l’hoplocampe, soit le phosmet (IMIDAN) et le thiaclopride (CALYPSO). Ces produits sont moins résiduels, mais moins toxiques pour les insectes et les acariens utiles, que les autres produits homologués contre le charançon (fiche 46).

Il est important de souligner que le carbaryl (SEVIN) utilisé pour l’éclaircissage est peu efficace pour le charançon, même à dose élevée.

Lorsque les interventions de la période postflorale ne sont pas efficaces, des dommages peuvent être causés par la nouvelle génération d’adultes en août. Toutefois, les traitements appliqués pour lutter contre d’autres ravageurs comme la mouche de la pomme seront efficaces si le charançon est présent. Voir la fiche 77.

 

Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.

bannière des principaux partenaires de réalisation et commanditaires du Guide de PFI

0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire