Désordres physiologiques et maladies d’entrepôt
Auteures de la première édition : Monique Audette, Jennifer DeEll et Maude Lachapelle
Auteure de la mise à jour 2023 : Monique Audette
Dernière mise à jour par l’auteure : 19 janvier 2023
En dépit d’une apparence saine à la sortie du verger, les fruits peuvent subir une dégradation pendant et après la période d’entreposage, occasionnant des pertes financières importantes. Cette fiche propose des pratiques à mettre en œuvre pour aider à prévenir les dommages causés par les agents pathogènes et les désordres physiologiques pouvant apparaître suite à l’entreposage. Lorsque disponibles, les méthodes de lutte sont décrites à la fiche sur les Désordres physiologiques et maladies d’entrepôt.
Maladies fongiques
Les parasites responsables de ces maladies se nourrissent de matière organique fraîche ou en décomposition et sont présents à toutes les étapes, de la production à la commercialisation. L’infection peut donc survenir au verger sans qu’il y ait de symptômes apparents à la récolte. Elle peut aussi se produire pendant le transport, durant le conditionnement et le triage, ou encore dans les chambres froides. L’inoculum pénètre habituellement dans le fruit par une blessure à l’épiderme, par les lenticelles ou par la cavité oculaire. Les températures des chambres froides n’arrêtent pas la progression de la contamination. De plus, l’humidité relative ambiante constitue très souvent un facteur favorable au développement de ces maladies.
Les maladies fongiques les plus fréquentes liées à la présence d’organismes pathogènes au verger sont la tavelure d’entrepôt, la pourriture du cœur (Alternaria sp.), la pourriture mucorienne (Mucor spp.), la moisissure bleue (Penicillium expansum) et la pourriture grise (Botrytis cinerea).
Voici certaines des bonnes pratiques à adopter afin de diminuer les infections par ces organismes :
- une bonne protection fongicide contre la tavelure pendant la saison diminue les risques de développement de la tavelure d’entrepôt (voir les fiches Fongicides et bactéricides homologués en pomiculture au Québec, Description des fongicides non sujets à la résistance, Description des fongicides unisites et à risque de résistance, La tavelure : biologie, La tavelure : stratégies générales de lutte, La tavelure : traitements contre les infections primaires et La tavelure : traitements d’été);
- une manipulation délicate des fruits diminue les lésions (voir la fiche sur La récolte et la mise en marché);
- le fauchage des allées du verger, fait au plus tard 30 jours avant la récolte, réduit la quantité de matière organique dont se nourrissent les parasites;
- le retrait des fruits momifiés, en décomposition au sol et dans les arbres élimine les sources d’infection;
- le nettoyage des sacs et des chariots de cueillette ainsi que des bennes;
- le nettoyage et la désinfection des chambres d’entrepôt réduisent les sources d’infection.
Désordres physiologiques
Les désordres physiologiques surviennent pendant l’entreposage ou à la sortie des chambres, sans l’intervention d’agents pathogènes. Les causes sont diverses et souvent concomitantes, mais toujours reliées soit à un déséquilibre nutritionnel, une maturité inadéquate du fruit, des conditions climatiques défavorables ou des conditions d’entreposage inappropriées.
Les désordres post-récolte sont nombreux, toutes les variétés ne sont pas affectées également et il est difficile de mettre en cause un seul facteur ayant favorisé leur développement. Toutefois, certains facteurs favorisants peuvent nous mettre en alerte.
Un déséquilibre minéral ou une maturité inadéquate du fruit augmente le risque de développement de la tache amère, la dégradation des lenticelles, l’échaudure molle, l’échaudure superficielle, le brunissement diffus de la chair ou le brunissement de sénescence en entrepôt.
Certaines conditions climatiques saisonnières favorisent le développement du cœur aqueux, du brunissement du cœur, du brunissement vasculaire, du brunissement humide de la chair, de l’échaudure molle, de l’échaudure superficielle et de la tache amère.
Des conditions d’entreposage pourraient aggraver le développement de lésions externes causées par le CO2, de lésions internes causées par le CO2, de lésions causées par une faible concentration en O2, de brunissement de la cuvette pédonculaire, d’altérations causées par le CO2, de la dégradation causée par les basses températures ou de la tache de la pelure.
Les descriptions détaillées des désordres, accompagnées de photos, se trouvent sur l’affiche « Troubles de conservation des pommes», produite par Storage Control Systems. L’affiche peut être téléchargée gratuitement à partir du site web des Producteurs de pommes du Québec.
La prévention des désordres physiologiques d’entrepôt débute au verger. Les arbres, le sol, le microclimat et la régie du verger constituent la base de la production de fruits de qualité destinés à la conservation (voir les fiches sur la Gestion du sol et du sous-sol, Apports en éléments nutritifs et Contrôle de la charge (éclaircissage chimique, mécanique et manuel)). Ainsi, seuls des fruits en équilibre minéral devraient être entreposés. Les fruits de très gros calibre, ceux qui proviennent d’arbres très vigoureux, d’arbres de charge faible, d’arbres nouvellement implantés ou produits dans une section ombragée de l’arbre ne doivent pas être entreposés car ils présentent un risque élevé de développer des désordres physiologiques. Également, les fruits qui ont été récoltés trop tôt et qui affichent une forte teneur en amidon et ceux qui sont récoltés trop tard et qui dégagent un taux élevé d’éthylène ne conviennent pas à la conservation (voir la fiche sur le Suivi de la maturité et de la qualité des fruits).
Les conditions climatiques pendant la saison de croissance agissent sur la qualité des fruits et influencent leur entreposage. Une chaleur intense accompagnée d’un fort ensoleillement favorise le développement du cœur aqueux. Un temps nuageux, frais et humide au cours des quelques semaines qui précèdent la récolte favorise le développement du brunissement du cœur et de la dégradation causée par les basses températures. Des conditions fraîches et pluvieuses durant les mois de juillet et août favorisent le brunissement vasculaire, particulièrement chez la variété McIntosh. L’échaudure superficielle, quant à elle, est plus sévère quand les conditions météorologiques sont chaudes et sèches durant les dernières semaines avant la récolte. L’exposition à des températures inférieures à 10 °C pour une certaine période avant la récolte tend à réduire son développement.
Malgré qu’elles soient généralement imprévisibles et incontrôlables, les conditions climatiques doivent être observées avec attention afin de prévoir leur impact sur la conservation des fruits et prendre les mesures correctives appropriées. Des modèles prévisionnels ont été développés par des chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada et sont implantés dans le Centre informatique de prévisions des ravageurs en agriculture (CIPRA) pour prévoir le risque de développement de certains désordres. Des modèles existent pour prévoir le risque de développement de l’échaudure superficielle, du brunissement vasculaire, du brunissement humide de la chair, de l’échaudure molle et de la tache amère. Ces modèles utilisent des données météorologiques en temps réel, ce qui permet d’obtenir un indice de risque avant la récolte et ainsi de mieux planifier les conditions d’entreposage et la mise en marché des pommes. Grâce à cette information, le producteur est plus en mesure de décider si les pommes de variétés sensibles seront acheminées vers le marché frais plutôt que vers l’entreposage. Ces modèles aident aussi l’entrepositaire à évaluer la pertinence de traitements préventifs au 1-MCP ainsi qu’à ajuster les paramètres d’entreposage.
Chaque année, en septembre, les indices calculés par le logiciel CIPRA pour les désordres mentionnés sont publiés par Les Producteurs de pommes du Québec et diffusés aux producteurs et entrepositaires sous forme de communiqués.
Les paramètres d’entreposage doivent être ajustés chaque année selon les conditions climatiques de la saison de croissance. Des recommandations de conservation pour les principaux cultivars commerciaux sont publiées en septembre par les Producteurs de pommes du Québec. Un cahier des charges pour les entrepositaires « Amélioration des pommes entreposées en atmosphère contrôlée » produit par Gestion Qualiterra est également disponible en ligne sur le site des Producteurs de pommes du Québec (Exemple pour saison 2023).
La durée et la température de la période initiale de refroidissement des fruits ainsi que la température de la chambre à atmosphère contrôlée (AC), sa teneur en O2 et sa teneur en CO2 sont les paramètres importants qui doivent être ajustés avec prudence. Certains cultivars sont très sensibles aux variations de ces paramètres. Un refroidissement et une mise en conditions AC rapides sont très risqués pour les fruits de la variété Honeycrisp. Les fruits de la variété McIntosh sont très sensibles aux basses températures maintenues dans les chambres AC. Les fruits de la variété Empire sont sensibles aux températures d’entreposage plus élevées (3 °C au lieu de 0,5 °C).
Cette fiche est une mise à jour de la fiche originale du Guide de référence en production fruitière intégrée à l’intention des producteurs de pommes du Québec 2015. © Institut de recherche et de développement en agroenvironnement. Reproduction interdite sans autorisation.
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